ça m'est revenu, il faut que je fasse une page hotglue. C'est l'outil que je préfère pour étaler mes idées et les montrer mais même avant ça, ça me permet de pouvoir avoir l'espace pour regrouper toutes mes intuitions sur le même écran et faire émerger mes idées, qui ont parfois du mal à advenir avec des mots.
Il faut donc que je revienne sur la question du sens que cette recherche à pour moi.
Pour qu'elle est raison d'être. (avoir LIEU d'être)
Qu'est-ce que je cherche ?
Tout d'abord c'est une façon d'éclairer mon histoire personnelle au regard de lectures sociologiques, ça me permet de m'expliquer ce qui se passe et ce qui s'est passé, de mettre mon expérience (aussi banale qu'elle soit) dans des contextes socio-éco-géo-politique. J'insiste toujours là-dessus.
Il y a quelque chose qui console dans : pouvoir justifier un malaise intime par un certain contexte politique plutôt que parce qu'il serait en nous et qu'on en est l'unique responsable. Quelque chose qui déplace la colère qu'on à contre soi-même (de ne pas être comme il faudrait) vers une colère contre la société ou une institution qui fabrique des normes qui participent à notre exclusion.
Et voilà, je pense, ce qui m'empêche d'aller plus loin: la peur d'être complètement cringe, à côté de la plaque, passer à côté de la montagne de privilèges et me plaindre de ma situation, et monopoliser la parole, donc la prendre à d'autres.
Mon sujet, si je pars de ces expériences personnelles, c'est presque uniquement : comment est-ce que, 40 ans après la publication de La place d'Annie Ernaux, on tolère encore les mécanismes classistes ? Qui vient se mélanger à mon décor à moi, et qui donne : qu'est-ce qu'on fait de l'adolescence rurale issue des classes populaires et moyennes?
Mais est-ce que je fais ou j'ai fait partie de la classe populaire ?

Est-ce que ça vaut encore la peine de créer de la littérature universitaire sur ces questions de classes sociales sans parler d'intersectionnalité ?



Je crois que je suis obsédée par l'indécence des plus privilégiés que moi, et énervée par leur mépris, et en même temps terrorisée par mon indécence à moi.
Hypothèse : Changer (effacer les signes d'appartenance à sa classe sociale d'origine) ou rester à sa place. On en revient donc à Annie Ernaux, Didier Eribon, Edouard Louis, et la question des transfuges de classe.
C'est moins une question de classe économique que de classe culturelle.
l'école pour être cultivé.e mais qu'est ce que c'est qu'être cultivé.e ? Qui est et qui n'est pas cultivé.e ? Qui détient le bon goût ? Qui détient le mauvais ?
En fait, ce qui m'a marqué le plus, c'est ce conditionnement à paraître "cultivé.e" et à déclasser tout ce qui n'est pas de bon goût. Donc repérer et disqualifier ce qui est de mauvais goût.
Le problème ça a été de me rendre compte qu'il fallait sans doute disqualifier une partie de mon décors d'enfance.
=>lien Télérama Annie Ernaux, "Venger sa race".
< cliquer ici >
Ca me fait me sentir mal d'écrire tout ça. C'est sans doute intéressant et ça me fait du bien de le formuler mais je suis pas prête à assumer un propos pareil maintenant, j'arrive pas à expliquer ce que je ressens à propos de cet écrit.
En plus je me souviens avoir écrit un truc similaire l'année dernière, c'est toujours au même endroit que je bloque.
Embrasser une vision ambivalente et changeante de son rapport à son lieu de naissance.

Je ne sais plus trop comment je suis tombée sur "L'amour des fantômes" de Christian Bobin. Via internet, je n'ai pas accès au livre physique. Etant au Mexique, je n'ai pas accès au livre du tout (à part quelques citations courtes que des lecteurices ont publié, et le résumé que propose le site de l'éditeur ou la Fnac...). C'était intéressant de se faire une idée du livre seulement avec ces quelques indices. Une partie du résumé s'est fixée dans mon crâne :
"Parlant de sa ville natale, Christian Bobin fait exploser toutes les notions tristes d’appartenance, de racines, voire d’identité."
N'ayant que cette phrase, je dois m'imaginer pourquoi il trouve ces notions "tristes" et qu'est ce qu'il en fait, quel est son propos, par quoi est-ce qu'il remplace ces notions ?
Le rapport à la honte, à la trahison
??
Le rapport à la fierté, avoir habité un autre monde, être à deux endroits à la fois, sentir la force du lien quand je ne suis plus dans le Jura. Il y a quelque chose d'un peu magique dans cette position d'avoir connu deux milieux très distincts.

Je me rends compte que j'ai tendance à voir le négatif de la situation et que je pourrais renverser ma vision et dire l'extrême inverse que je sentirais aussi que c'est vrai.
Capture d'écran d'une publication Instagram de bdcolomiers, compte du festival BD de la Ville de Colomiers, datant du 18 novembre 2022.
Photo : @iampphotographie
Je n'ai pas retrouvé le nom de l'artiste malheureusement. :'(
Capture d'écran d'une vidéo de l'artiste Gaspar Willman, "Slonfa Shenfa" 2021, disponible sur viméo.
Cliquez sur l'image, c'est un lien vers son profil viméo.
Voir aussi "Vous êtes chez vous" (et écouter surtout la voix, intonations diction, ce qui est dit, ce qui est répété, l'ambiance du vide et la solitude.)
Description sous cette vidéo :
19 janv. 2016
Frankie Cosmos, Outsides with the Cuties, Next Thing.
Director/Editor Garrett Weinholtz shot singer Greta Kline performing the track “Outside With The Cuties” to the surreal miniature towns of Northlandz
Interview Edouard Louis: France Inter
Le mot trahison pour culpabiliser la mobilité ascendante de certain.e.s
Expérimentation : Mettre en mouvement le diorama. Ce diorama, c'est le jardin d'une maison abandonnée, le décors d'un scénario de film d'horreur que mon groupe avait écrit le semestre précédent. Visiter un diorama, devenir miniature soi-même.
J'ai décidé de me filmer alors que je film le diorama de près, surtout par curiosité, je voulais me rappeler de l'installation, de la mise en scène qui permet la mise en scène. Rendre visible aussi mon expérience, la tête sous la couverture, plongée dans ma propre fiction en impliquant tout mon corps. Le dispositif me semblait plus intéressant que le film qui serait rendu. Je ne m'étais pas rendu compte que les ombres de la balançoire et de l'arbre se projetteraient en ombre chinoise sur la couverture, ça me plait de me dire qu'on peut déjà s'imaginer ce qui se passe sous la couverture sans faire l'expérience. De l'extérieure, cet ensemble noir, le flash de la lampe me rappelle la spéléologie que j'avais évoqué en M1 avec le souvenir des Grottes des Moidons, dans le Jura.

Protocole de lecture des vidéos : (mais surtout faites comme vous voulez :) )
Commencer par la vidéo en haut, regarder les 15 premières secondes puis lancer la deuxième vidéo sans couper la première.
Comme ça, les vidéos sont deux points de vue en simultané.




Après avoir terminé le diaorama demandé pour le cours "Dioramas y Modelados", construit avec Carol Contreras, Paulina Martinez, Noe Blanco et Ramses Menguelle; je décide de le garder pour expérimenter l'usage de la video avec le diorama.
Au Mexique on m'inicie à la création de diorama ou de modèle miniature et j'ai l'impression que cela fait sens de l'intégrer dans mon projet de mémoire à ArTeC. Tout d'abord parce que j'aime assez l'idée que tout ce qu'ArTeC me permet de découvrir via les cours ou cet échange, puissent être encapsulé dans le projet final, comme un panorama de tout ce par quoi ma recherche a été confrontée ces derniers mois/années, comment elle a muté au contact de certaines thématiques, de certaines pratiques. Raconter le processus et imaginer la recherche (peut-être particulièrement car c'est une recherche-création) comme un objet en mouvement, la description d'un processus. (Je tiens cette vision de la lecture d'un article de Louis-Claude Paquin "Faire le récit de sa pratique de recherche-création" et à d'une partie du mémoire ArTeC d'Alejandro Van Zandt-Escobar)
Faire recherche dans l'espace, penser la recherche dans un espace non-linéaire, dans un espace en 3 dimensions. Hotglue (et tout espace qui permet la connexion par hyperlien) permet déjà une lecture plurielle de la recherche, un cheminement personnel (du/ de la lecteurise) dans la recherche moins guidé que sous le format linéaire. Je tiens à cette lecture libre, peut-être parce que j'ai personnellement un peu de mal à lire de la recherche linéaire, j'ai tendance à penser que ce mode de lecture (et donc d'écriture) est plus inclusif.
Parfois, je me demande comment je peux faire de la recherche en ayant autant de difficulté à lire de la recherche, donc à avoir des ressources pour bâtir une quelconque recherche. Edouard Louis et Annie Ernaux font une sociologie sous une forme littéraire (une recherche-création ?), le fait que ce soit des récits personnels (avec les ressorts de la narration, des personnages...) me rend les lectures beaucoup plus faciles, et ce sont ces lectures-là qui m'ont poussée à la recherche.
Je pense aussi que j'ai un peu paniqué, parce que j'ai l'impression de partir dans tous les sens, que je développe des idées chacune très loin les unes des autres, si bien que j'oublie parfois comment je les avais connecté.
Il faut apprendre à ranger.
Hotglue me permet de créer ce bazar organisé. C'est pas vraiment rangé, mais c'est positionné d'une façon qui a un sens pour moi. On peut parler de mise en scène du savoir, peut-être.
Ca me rapproche aussi la représentation d'une pensée en arboresence, de la cartographier.
Rapidement, je pourrais commencer par vous montrer quelques projets que j'ai découvert récemment et qui m'aident à penser ma propre recherche.
"Outside with the cuties
I don’t think the woods are too deep
The grass covers the sand
All the wood is damp
Feeling very touched
Cause my friends are in love

Feeling pretty far from home
So I sit to write this down
I guess it’s not really brave
I know I’m not a lake
I haven’t written this part yet
Will you help me write it?

You are bug bites on vacation
You find the sad in everything
Can’t see you cry, you’re down the street
I wonder when you’ll talk to me

Your eyes reflect the greenish moon
You move towards me and I love you
I love you
I love you

I haven’t finished this song yet
Will you help me fix it"
J'ai la sensation qu'un problématique pourrait déjà se dégager de tout ce que j'assemble ici. En tout cas je vois mieux mes enjeux :
-Comment dire, écrire ? Dans quel langage faire recherche?
-Grandir là-bas
-Ce que la mise en espace fait à la recherche
Le concept de capital d’autochtonie a été développé par Retiere en 2003 pour définir le type de ressources que peuvent développer les individus des classes rurales et populaires pour compenser (en partie) les manques en capital économique et culturel (titres scolaires). Être doté.e en capital d’autochtonie, c’est être suffisamment intégré socialement, à une échelle locale (celle du village par exemple), être bien vu.e ou reconnu.e pour son engagement dans la vie locale. Les individus qui en sont pourvus bénéficient parfois d’avantages à l’insertion professionnelle, à l’accès à la propriété ou sur le marché matrimonial.
Photo prise en décembre 2020, j'habite chez Camille quelques semaines à Aix-en-Provence, où elle étudie. On est amie depuis petite, on a toutes les deux grandit à Lons-le-Saunier. Tous les mercredis, on avait entrainement de basket dans la vielle salle omni. Pendant deux heures, on entendait plus que les ballons frapper le sol, une douzaine de ballons et leur son qui resonnait contre les vieux murs. Quand le coach donnait une nouvelle consigne, c'était une voix et la ventilation. Et puis les ballons reprenaient. Les samedis, on portaient toutes le même maillot rouge de l'ALL, on partait loin jouer contre d'autres équipes dans des villes encore plus paumées que la nôtre, ou bien on les accueillait chez nous, dans la vielle salle omni de Lons-le-Saunier. Je crois qu'à part ces déplacements on connaissait peu le Jura, mais une fois qu'on est parti pour les études, on s'est rendu compte que c'était beau de venir de là-bas. Ou bien ça nous faisait rire de se la jouer chauvine d'un endroit que personne ne connait. Un endroit à nous. Alors c'est devenu l'endroit le plus beau du monde: je pourrais vous parler pendant des heures du lac de Vouglan, de la grotte des Moidons ou de la Salle Omnisport de Lons-le-Saunier, mais maintenant je ne suis pas moins une touriste que vous là-bas. Je sais pas. J'aime bien dire que c'est chez moi, ce que je dis pas c'est que j'ai le mal du pays quand j'y reste plus d'une semaine. C'est pas grave, je l'aime cet endroit.

On a affiché un drapeau MADE IN JURA (où est-ce qu'elle a trouvé ça ??) dans sa chambre et ça nous a fait rire.

C'est peut être juste ça, on est made in Jura, fabriquée à Lons, née dans la seule maternité du seul hôpital de Lons et des 50 kilomètres alentours, comme tous.te les personnes qu'on a côtoyé dans le Jura, à l'école, au collège et au lycée, comme nos parents et tout le monde autour, sauf que nous, on est parties, et d'un seul coup ça faisait sens d'afficher un drapeau pour dire : "voyez je viens de là-bas."

C'est peut-être ça aussi qui me pousse à écrire ce mémoire, prouver que ça fait encore partie de moi que c'est encore en moi (est-ce que ça veux dire quelque chose ? Le Jura en moi ? La part de moi qui "appartient" au Jura ?), que je n'ai pas oublié.
Et puis je relis ça et je me rends compte à quel point faire un mémoire pour me connecter avec le Jura c'est peut-être la chose la plus contre-productive que j'ai jamais faite. C'est typiquement cette activité (l'activité académique, écrire un mémoire, d'autant plus un mémoire à vocation artistique : écrire CE mémoire) qui m'écarte de ce que c'est que de vivre dans le Jura, vivre avec les gens du Jura. Je pense que je connecte plus avec des parisiens née en Bretagne qu'avec n'importe quel.le Jurassien.ne qui vit encore dans le Jura. Pas grave. Je dois me rendre à l'évidence que ce mémoire je l'écris pour moi surtout. C'est ma façon de dire au revoir.
Benoit Coquard a publié "Ceux qui restent" en 2019, encore une fois je n'ai pu lire que les descriptions et résumés du livre. Mais je laisse ci-dessous une prise de note de l'interview de Benoit Coquard sur les masculinités dans les campagnes françaises en déclin: https://www.binge.audio/podcast/les-couilles-sur-la-table/les-gars-du-coin
Dans cette interview, il explique rapidement comment la notion de capital d'autochtonie est à l'oeuvre dans les zones rurales peu dynamiques.
Pour la suite:
la narration par l'espace, le décor. Comment raconter quelque chose seulement à l'aide du décor.
Je sais que ce n'est pas vraiment lisible, je mets ça là pour me souvenir d'y revenir plus tard et de reformuler, citer précisément, reprendre cet axe de capital d'autochtonie, l'appliquer aux adolescents (dont finalement je n'ai pas encore beaucoup parlé).
J'écris des petits paragraphes en les positionnant dans un endroit qui fait sens pour moi. Deux paragraphes à proximité ont un lien, c'est une façon d'inciter la.e lecteurice à lire ces deux paragraphes à la suite (en commençant par l'un ou par l'autre). Parfois même, deux paragraphes s'enchevêtre, comme si on devait les lire tous les deux à la fois. Cela rends parfois la lecture un peu plus compliquée, mais c'est une façon d'illustrer comment, parfois, dans ma tête deux réflexions peuvent être collées et difficiles à dissocier, ou bien comment j'associe un.e auteurice avec les idées qu'iel a fait naître en moi.
C'est une façon de cartographier ma pensée. ça me permet aussi de laisser ouvert chaque paragraphe, je veux dire, après avoir écrit un paragraphes je peux écrire une suite, la suite de la suite puis revenir au premier paragraphes et développer un autre aspect, faire une autre suite qui existe en même temps, en parallèle: créer plusieurs chemins possibles.
J'ai d'abord été frappé par la ressemblance avec mon endroit: la petite montagne et la croix au sommet. Mais c'est surtout de la disproportion entre le personnage et son environnement dont je voudrais parler. Le jeu de proportion peut être un moyen plastique pour rendre compte du décalage entre deux éléments qui ne semblent pas appartenir au même monde. C'est aussi le point commun entre cette œuvre et le clip précédent: la figure de la géante, qui m'évoque un peu la solitude, la non-adéquation avec le monde autour.
- les paroles, l'air mélancolique et les images du clip (un personnage coincé dans des paysages urbains et ruraux trop étroits)
- le questionnement autour de rester ou partir de la zone rurale dans laquelle on a grandit.
- la recherche plastique autour du format vidéo
C'est pour cela que Benoit Coquard parle de "ceux qui restent" et de "ceux qui partent": partir longtemps, le temps des études particulièrement, c'est souvent perdre ce capital d'autochtonie. Revenir après des études, c'est souvent devoir recréer cette intégration local en plus d'être confronter à la non-adéquation entre le marché de l'emploi rural et urbain, il y a peu d'emploi de cadre intellectuel supérieur dans l'espace rural comparativement à l'espace urbain par exemple. Le départ est donc souvent définitif.